Les frais d’expertise et de CHSCT à la charge de l’employeur

Les frais d’expertise et de CHSCT à la charge de l’employeur Il est des cas où la législation est bien facétieuse. Cela s’est vu dernièrement avec le cas de la SAS Foot Locker France qui a donné suite à une saisie, le 16 septembre 2015, du Conseil constitutionnel par le Conseil d’Etat sur une question prioritaire de constitutionnalité. En effet, le problème de la conformité des droits et libertés garantie par le Code du travail a été soulevé par cette affaire que nous allons étudier ci-après.

Le cas de Foot Locker France

Dans la SAS Foot Locker France, le CHSCT a décidé, comme il en a le droit, de faire appel à un expert. Cette décision a immédiatement été contestée par l’employeur auprès du Tribunal compétent en la matière.

D’après la Cour de cassation, malgré une annulation, en justice, de la délibération ayant débouché sur un recours à une expertise, la société devait malgré tout assumer les frais engendrés.

Les frais d’expertise étant totalement imputables à l’employeur dans les cas classiques le sont, finalement, aussi dans les cas ayant été contestés.

Foot Locker France estimait alors avoir été spoliée dans son droit de propriété et sa liberté d’entreprendre mais aussi dans son droit au recours juridictionnel.

La réponse du Conseil constitutionnel

Après étude de ce cas, le Conseil constitutionnel a effectué les constats et réflexions suivants :

  • Tout expert mandaté par le CHSCT peut accomplir sa mission, même en cas de recours rapide de l’employeur contre cette décision du comité. Le TGI statue alors, comme le requièrent les articles R. 4614-19 et R. 4614-20 du Code du travail en urgence et sous forme de référé. Cependant, le juge n’est pas tenu de statuer dans un délai imparti. L’employeur est alors tenu de régler les frais d’expertise malgré l’annulation de la décision du CHSCT.

  • Dans une telle configuration, force était de constater que l’employeur perdait alors toute protection de son droit de propriété. Effectivement, l’effet suspensif du recours ne s’appliquant pas à l’expert et le délai d’examen n’étant pas limité, l’employeur se voit automatiquement lésé dans ses droits.

Le Conseil constitutionnel en est donc arrivé à la conclusion que la procédure applicable en pareille situation ne tient pas compte des dispositions de l’article 16 de la Déclaration de 1789, privant ainsi “de garanties légales la protection constitutionnelle du droit de propriété”. Par conséquent, il a déclaré contraire à la Constitution le 1er alinéa et la 1ère phrase de l’alinéa 2 de l’article L. 4614-13 du Code du travail. Le législateur a maintenant jusqu’au 1er janvier 2017 pour remédier à cette inconstitutionnalité.

L’obligation de sécurité

L'obligation de sécurité L’époque est à la sécurité. Aussi est-il bon de rappeler cette jurisprudence de la Cour de cassation concernant une obligation de moyens renforcée et non pas, comme elle l’était auparavant, de résultats, prise à l’encontre de Air France.

La Cour de cassation ne reconnaît pas la responsabilité de l’entreprise

Un salarié d’Air France avait été témoin, depuis son hôtel, de l’effondrement des tours de New York, le 11 septembre 2001. 5 années plus tard, il était pris d’une crise de panique débouchant sur un arrêt de travail.

En 2011, il était licencié par la compagnie pour ne pas s’être présenté devant une visite médicale qui devait statuer sur son état et son aptitude à exercer un poste au sol.

Devant le licenciement, le salarié avait porté l’affaire devant la justice mais la Cour d’appel et, plus encore, la Cour de cassation, l’ont débouté.

Un jugement qui fera date

En fait, la Cour de cassation reconnaît que l’entreprise a pris toutes les mesures qui étaient nécessaires. A son retour de New York, le salarié a bien été pris en charge par du personnel médical, avec possibilité de l’orienter vers une consultation psychiatrique. En outre, il a été déclaré apte lors de 4 visites préalables. Ses documents médicaux datant de 2008 n’ont pas été considérés comme en lien direct avec les faits.

Ce qui change

Auparavant, la Cour de cassation, dans ses dossiers de jurisprudence avait tendance à pendre en compte le résultats plus que les moyens mis en oeuvre par l’entreprise pour les éviter. Il aurait été jugé le fait que le salarié était malgré tout tombé en crise de panique et non que tout avait été fait par Air France. Même lorsque l’entreprise était reconnue comme ayant pris les bonnes mesures, elle était condamnée parce que les faits s’étaient quand même déroulés. Il en ressortait qu’elle savait avoir perdu d’avance quelles que soient les mesures qu’elle prenait. L’employeur était donc reconnu en faute même s’il n’était pas reconnu responsable.

Avec cette décision, cette jurisprudence pourrait être revue et cette décision de la Cour de cassation va certainement jeter le trouble sur de nombreux dossiers.