La préparation d’une enquête

La préparation d’une enquête Dans le cadre de la préparation d’une enquête suite à un suicide ou, tout du moins, une tentative de suicide, la Délégation d’Enquête va devoir réaliser un certain nombre de démarches. Depuis la nécessité de recueillir des informations à l’établissement d’une liste de personnes à sonder, en passant par la mise en évidence des divers événements chronologiques, il ne faudra rien laisser au hasard. Découvrez, dans ces quelques lignes, de quoi il retourne.

Des informations à obtenir

Pour commencer, la Délégation d’Enquête doit récolter diverses informations. Celles-ci devront porter sur le travail effectué par le salarié ainsi que sur le contexte professionnel dans lequel il évoluait avant l’incident. On pourra notamment étudier les fiches de notation, la nature du poste occupé, le relevé de carrière et celui des heures travaillées, les éventuels entretiens annuels…

Si jamais l’enquête devait conduire à une consultation des courriers électroniques ou postaux, ou encore à une inspection de son ordinateur, la DE est tenue d’organiser, au préalable, une discussion.

Cette collecte de renseignement, quoi qu’il arrive, ne portera jamais sur des données personnelles de la victime. Ainsi, seront automatiquement écartés les agendas et smartphones privés, les dossiers notés “personnel”, même dans l’ordinateur professionnel, etc.

Les événements chronologiques

La DE aura ensuite à reconstituer le parcours du salarié dans la société. En effet, depuis son arrivée à la date fatidique de son acte suicidaire, en passant par ses éventuelles mutations, changements de poste, formations…, tout sera repris sur un tableau ou une frise chronologique.

Les personnes à interroger

Vient alors la phase de la mise en évidence des personnes susceptibles d’apporter un témoignage concernant la victime. Leurs interventions, volontaires et confidentielles, pourront permettre à la DE de mieux appréhender les circonstances dans lesquelles se sont déroulés les faits, l’état d’esprit du salarié, l’activité de ce dernier.

Pourront alors être invités à parler les divers acteurs de l’entreprise, que ce soit des collègues ou des personnes de la hiérarchie. Mais il sera aussi possible, pour des personnes extérieures à ce milieu professionnel, de s’exprimer. Le conjoint sera effectivement en mesure de s’entretenir avec la DE s’il le souhaite.

Toutes les personnes entendues seront alors informées quand à la mission de la délégation.

La validation des principes

La validation des principes Avant même de se mettre au travail sur leur enquête, les membres de la délégation d’enquête (DE) doivent se mettre d’accord sur tous les principes qui vont garantir, ensuite, l’éthique, la rigueur et le sens de l’analyse à réaliser. Ces principes permettent de déterminer les règles et le cadre sur lesquels la DE se reposera pour mener à bien sa mission. Ils sont au nombre de 10 et sont totalement indissociables.

  1. Suicide ou tentative sont soumis à des causes multiples, l’enquête devra déterminer quels facteurs professionnels ont une incidence sur le geste de la victime, auxquelles s’ajoutent des causes personnelles n’entrant pas dans l’analyse.

  2. Au travers de l’étude du travail et de son organisation, mais aussi des contraintes professionnelles, des mesures de préventions sont mises en place afin d’éviter qu’une telle situation ne se reproduise.

  3. Basée sur les faits, l’enquête n’apporte pas un jugement de valeur. Les enquêteurs s’appuient donc uniquement sur les conditions et l’organisation du travail, sur l’activité professionnelle.

  4. La vie privée le reste et ne fait donc pas l’objet d’une enquête. Les facteurs personnels ne sont donc pas étudiés bien qu’ils interagissent avec la vie professionnelle.

  5. Si la DE n’est pas tenue d’aborder son enquête de manière juridique avec une recherche de responsabilité, elle peut cependant fournir son rapport aux autorités compétentes en cas de poursuite de la part des ayants droit.

  6. Si la DE ne rend pas d’avis concernant une possible responsabilité du travail face au geste du salarié (rôle de la CPAM ou de la Commission de réforme), son rapport peut donner des informations aux organismes concernés.

  7. Ne pas confondre “diagnostic” (analyse basée sur l’activité du salarié et les entretiens réalisés sur une certaine cible) et “proposition de mesures” (préconisations argumentées basées sur l’analyse).

  8. Après débat, le CHSCT détermine les suites à donner, procède au vote validant l’enquête et prévoit le mode de diffusion du rapport.

  9. La confidentialité est de mise sur l’ensemble des informations recueillies. Mais la DE peut informer le personnel de l’évolution de l’enquête si nécessaire.

  10. Un principe de “non préjudice général” doit être appliqué par l’entreprise afin de ne pas sanctionner les salariés refusant un entretien ou tenant certains propos face à la DE. La société s’engage aussi à mettre en place les préconisations soumises par la DE et acceptées par le CHSCT.